Il y a des jours où
rien ne va. Manifestement hier était l’un de ceux-là. Ça commence par le petit
doigt de pied qu’on cogne au coin du lit, puis l’on marche sur un jouet qui n’a
pas été rangé et qui fait pimpompin donc réveille le bébé, qui pleure et réveille
sa sœur et tout ça à six heures du mat. Le reste de la journée n’est qu’une
succession d’évènements similaires. C’est facile de croire en la schcoumoune. J’ai toujours refusé de m’y
abaisser ou de le prononcer sait-on jamais. Je veux rester maître de ma vie le
plus possible et laisser l‘arbitraire, le hasard, la fatalité à distance. Mais
hier, j’étais guidé par la maladresse, le pas de bol.
Oscar et moi avons
voulu passer le samedi ensemble. C’est pas souvent qu’on se retrouve tous les
deux, et j’aime bien quand ça se présente. On a commencé la journée par un
casting. Oscar a fait le mannequin pour une marque de vêtements d’enfants. J’ai
des principes et je n’ai jamais voulu que mes enfants soient dans une agence de
mannequins. Pourtant, sans me vanter, je pense qu’ils sont les plus beaux
enfants du monde, mais l’idée de courir les castings ne m’a jamais branché et
puis je n’aimerais pas qu’ils grandissent en pensant qu’ils sont les plus
beaux ; y’a que moi qui le sait, ils doivent se concentrer sur d’autres
choses essentielles de la vie comme le partage, le travail, la gentillesse,
l’humour pour ne citer qu’eux. Rosie passe assez de temps devant sa glace à
chanter ou à se maquiller, comme moi. Pour le maquillage. Elle n’a pas en plus
besoin d’un regonflage d’ego, d’ailleurs elle m’a dit un jour qu’elle savait
qu’elle était belle que je n’avais pas besoin de lui dire tout le temps. C’est
donc réglé.
Mais Oscar étant plus âgé j’ai fait une exception, j’aime aussi
revoir mes principes d’éducation quotidiennement. Il y a un an, il m’a demandé
pour faire comme son copain Joe, de s’inscrire dans une agence de mannequin.
Après des heures de réflexion, un retour sur mes notes et sur ce que je pensais
déjà, des enfants mannequin, une réunion au grand sommet avec moi, Pip, Rosie
et George, je me suis dit qu’Oscar était beau et qu’il était temps de mettre en
pratique mon concept du partage.
Partageons sa beauté avec le reste du monde sur des affiches 4 par 4. Il
était assez grand pour décider et il avait assez confiance en lui. Au bout de
trois mois à me tanner pour le faire, j’ai cédé.
Nous avions pris la chose au
sérieux, fait des études de comparaison de la meilleure agence. Rencontrer
plusieurs personnes, dont des arnaqueurs, pour finalement envoyer des photos à la
plus respectable de Londres, parce qu’on aime la qualité et qu’on a un produit
de qualité à leur offrir. Heureusement qu’Oscar a la ténacité d’un poisson
rouge car une fois l’inscription faite, il ne m’en a jamais reparlé. Et c’était
tant mieux puisque l’agence ne m’a jamais rappelé non plus. Chacun chez soi et
les moutons sont bien gardés. Aucun de nous ne s’est demandé pourquoi, tout le
monde s’en foutait, bien au courant de la superficialité de cet univers.
Jusqu'à la semaine dernière, où on lui a proposé son premier casting. Nous
étions donc en route pour une journée à deux et l’idée nous enchantait. Sauf
que voilà, j’ai commencé cette journée du pied gauche.
Retour en
arrière : après le casting, qui s’est, ma foi, très bien passé, Oscar
était regonflé à bloc, heureux de lui. On a décidé de se faire un snack sur le
pouce et un ciné. Bon public, on était près à voir n’importe quoi, du moment
que la séance était à midi.
Seul, Zero dark thirty coïncidait à notre
emploi du temps serré. Nous voilà en route pour la chasse à Ben Laden. On fait
la queue, on fait des blagues, l‘ambiance est bonne jusqu'à ce que j’entende
Oscar dire au guichetier « j’ai 15 ans ! Oui monsieur » je
fouillais dans mon sac, concentrée sur mon porte monnaie et je m’entends dire
haut et fort « non, il a 14 ans, Oscar tu as 14 ans ! ».
J’aime que les
choses soient claires, j’aime la justice et la vérité. J’étais aussi confuse,
toujours fixée sur la finance, je voulais payer le prix ado et non adulte. Je
n’ai pas réfléchi vraiment à ce que je disais, j’ai été con c’est tout. Pour 3 euros de différence, nous nous somme fait refuser
l’entrée. Le film est interdit au moins de 15 ans.
Oscar m’a regardé
du haut de son mètre quatre vingt, l’air désabusé comme s’il avait envi de
changer de maman. Il a soupiré. Oscar est grand, il pourrait dire qu’il a 25
ans qu’on pourrait le croire. Il est grand, beau, comme on le sait déjà, et a
une aura, une assurance de jeune homme plus âgé que son âge, il fait mature. Je
le revois maintenant, l’assurance avec laquelle il a dit « j’ai 15
ans » à ce mec, qui lui demandait son âge, comme on demande l’heure. Il
aurait pu lui faire avaler des couleuvres, l’hypnotiser, lui demander la caisse
si ça lui chantait.
Mais non, rien de
ça n’arriva, à cause de ma bêtise. Je n’ai pas compris qu’il essayait de nous
sauver la mise puisque je ne savais pas que le film était un moins de quinze
ans. Mais non, non, non, moi, la marâtre, toujours à rabrouer mon fils, j’ai
toujours le dernier mot. Il a fallu que je l’ouvre ma grande bouche. Et voilà,
le jeune homme au comptoir suant de doute, de peur de se faire virer, de ne
plus jamais vendre de popcorn de sa vie, nous a refusé la vente de tickets.
Malgré mes « mais ! Je suis sa mère !!! Je peux décider quand même »
Please ? »
Réunion. Oscar a le
droit de m’engueuler, je prendrai sur moi, j’ai fermé les yeux en m’attendant
vraiment à une volée de bois vert. Ça serait la seule fois de sa vie, qu’il en
profite. Et il ne s’en gêne pas, oh oui allons y de « Mais maman, qu’est-ce
que tu fous, il avait rien vu le mec, t’es vraiment…. !!!! ». Il
avait le choix :
Débile, sotte,
arriérée, à l’ouest, à la rue, pas cool, neuneu…
Mais il n’a jamais
fini sa phrase car une larme a coulé sur ma joue, juste une, que j’ai rattrapée
avec ma langue, reniflée puis je me suis redressée pour lui dire « viens,
on va voir un autre film, on a pas fait toutes ces bornes pour rien ». J’ai lu de l’admiration dans ses yeux. Il a vu mon courage et senti que je me battrai contre une armée pour lui faire plaisir.
C’est comme ça
qu’on a choisi d’aller voir Lincoln.
Un peu d’Histoire, je me suis dit que ça ne ferait de mal à personne ; et
puis Daniel Day Lewis, c’est conseillé quand on a le moral dans les
chaussettes.
Cette histoire m’a
embêté. Quelle conne j’ai été, où était mon cerveau, qu’est-ce qui m’a
pris ? Pourquoi, des fois, je ne réfléchis pas avant de parler? Bref,
j’étais dans les toilettes à réfléchir à tout ça, faisant mon pipi, le papier dans une main, les
tickets dans l’autre, je réfléchissais, et je réfléchissais, je me refaisais la
scène, invoquant les mauvais esprits et puis dans le feu de l’action je me suis trompée de main pour m’essuyer. Bien là, j’avais à mon
tour deux options : me faire Harakiri du haut de l’escalator du centre
commercial ou rigoler, parce que c’était tellement tropico qu’il valait mieux
en rire. Une deuxième larme a coulé mais cette fois d’amusement.
Merci à Cécile Petit pour ses illustrations burlesques et explosives de couleurs. Voici son site pour ceux et celles qui en veulent plus et sont prêts à découvrir ses créations:
toi ou julie, je vous laisse plus aux toilettes toute seule, vous ne faites que des bétises !
RépondreSupprimerMoi au moins, je ne ruine la fête de personne.
Supprimerccile, très jolies tes illustrations !
RépondreSupprimerXictime de ton succès tu es en tain de te faire spammer!!
RépondreSupprimerBiz
KK
au secours des pirates sur ton blog !! que fait la police ??
RépondreSupprimerJe pense que c'est parce que je deviens tres populaire avec cette histoire de blog ou alors c'est que j'ai mis MERDE en titre.
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